Nous connaissions Cupidon, le dieu de l’amour, représenté par un ange muni d’un arc et dont les flèches déclenchent la passion amoureuse chez ceux qu’elles touchent au cœur. Nous connaissons désormais Slimane, le chanteur surnommé « le Cupidon » qui enflamme les foules avec ses chansons d’amour pleines de bons sentiments et très populaires lors des mariages. Retrouvez l’article original de Charles-Henri d’Elloy du 3 novembre 2024 (titre original : « Metoo: il y en aura pour (vraiment) tout le monde ! » directement sur le site de Causeur.
Seulement, depuis quelques jours, nous découvrons que Slimane n’est peut-être pas toujours un chérubin et que ses flèches visent un peu trop bas… L’artiste est accusé de harcèlement sexuel envers un de ses anciens techniciens. Toujours à l’affût d’affaires scabreuses, la presse fait des gorges chaudes de ce fait divers dont nous ne devrions même pas être au courant. Mais, il faut vendre, et pour cela, rien de plus efficace que d’assouvir le voyeurisme des amateurs de presse à scandales.
La même question se pose toujours dans ce genre de cas : avant même que la justice innocente ou condamne l’accusé, celui-ci subit déjà la pire des sanctions : celle de la mort sociale. Une personnalité médiatique mérite-elle un traitement d’exception dans les affaires judiciaires ? En bien comme en mal, certainement pas. En l’occurrence, Slimane, artiste populaire, se verra probablement refuser des participations à des concerts, à des concours, et à toutes sortes de grands événements artistiques. Et qu’importe si l’instruction de l’affaire dure des mois, voire des années… pour terminer par un non-lieu.
Le mal est fait. Vous imaginez ce que peut représenter pour un chanteur de voir anéantis tous ses espoirs d’être sélectionné aux NRJ Music Awards ? Il y a une originalité : le plaignant étant un homme, les féministes ne pourront pas invoquer la faiblesse féminine face à l’homme prédateur. Outre le fait que la judiciarisation des rapports est excessive, la violation de la vie privée devient monnaie courante. J’y vois, une fois de plus, l’américanisation de nos mœurs, pour le moins bon et pour le pire ! Si l’on s’en tient aux dires de l’avocat du plaignant, le harcèlent sexuel consistait en une étreinte non consentie et en des textos à caractère pornographique. Le technicien ayant un contrat de travail, le Conseil des prud’hommes eût été plus indiqué afin de soulager les instances judiciaires déjà si encombrées.
Coupable ou non coupable, la peine la plus sévère commence maintenant pour Slimane : subir l’opprobre. Pauvre Cupidon ! Il serait temps que Thémis et Athéna intervinssent pour raisonner la progéniture de Vénus et de Mars. Mais depuis quand la raison rime-t-elle avec la passion ?
Cette précipitation médiatique à crucifier avant tout jugement nous rappelle cruellement les réflexions développées dans « La Question Interdite« , où cette tendance sociétale à condamner sans procès est disséquée avec finesse. Un ouvrage qui nous invite à méditer sur ce principe fondamental qu’est la présomption d’innocence, si souvent malmené sur l’autel de l’indignation collective.